[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Nos poumons possèdent des récepteurs olfactifs, révèle une étude américaine. Ils sont situés dans des cellules présentes dans nos poumons appelées "cellules neuroendocrines pulmonaires" (ci-dessus en vert). Crédits : Ben-Shahar
Nos poumons possèdent des récepteurs olfactifs, tout comme notre nez, révèle une étude américaine. Une découverte qui pourrait aider au développement de nouveaux traitements contre certaines maladies respiratoires.
Des scientifiques de l'Université de médecine de Washington (St Louis, États-Unis) et de l’Université de l’Iowa (Iowa City, États-Unis ) ont découvert l'existence de récepteurs olfactifs… dans les poumons humains. Ce résultat sera publié dans l’édition de mars 2014 de la revue American Journal of Respiratory Cell and Molecular Biology.
Contrairement aux récepteurs olfactifs présents dans notre nez, qui sont situés dans les membranes de cellules nerveuses, ces récepteurs olfactifs se trouvent dans les membranes de cellules appelées cellules neuroendocrines. Les cellules neuroendocrines ? Ce sont des cellules neuronales bien spécifiques, qui ont pour particularité de répondre aux signaux envoyés par les autres neurones non pas en transmettant un influx nerveux (comme une cellule nerveuse classique), mais en relâchant des hormones dans le sang.
Les cellules neuroendocrines dans lesquelles ces récepteurs olfactifs ont été trouvés sont situées dans les poumons. Elles sont dd'ailleurs habituellement désignées par l’acronyme PNEC, pour Cellules NeuroEndocrines Pulmonaires (en anglais Pulmonary NeuroEndocrine Cells).
Selon cette étude, lorsque les récepteurs olfactifs contenus dans ces cellules PNEC sont stimulés par des agents chimiques extérieurs, comme par exemple des polluants atmosphériques, les cellules PNEC déclenchent la libération massive d’hormones dans le sang (sérotonine, neuropeptides…).
Résultat ? Cette libération d’hormones dans le sang engendre une contraction brutale de notre appareil respiratoire. Un mécanisme qui pourrait avoir été sélectionné au cours de notre évolution pour sa capacité à nous protéger des substances extérieures néfastes pour notre santé, selon les auteurs de l'étude. Ces cellules PNEC et leurs récepteurs olfactifs seraient donc en quelque sorte des « sentinelles », qui aideraient notre organisme à mieux se défendre contre les composés chimiques irritants ou toxiques présents dans l'air.
Point intéressant : il se trouve que certaines maladies respiratoires, telles que la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) et l'asthme, sont associées à une hypersensibilité à certains agents chimiques extérieurs, comme les fumées de la circulation automobile, certaines odeurs piquantes, certains parfums… Or, ces composés chimiques ont un effet irritant sur ces malades, qui peut justement avoir pour conséquence de déclencher chez ces derniers une contraction brutale des voies respiratoires. Ce qui correspond précisément, comme évoqué plus haut, au phénomène qui se produit lorsque les récepteurs olfactifs des cellules PNEC de nos poumons sont stimulés par des agents chimiques extérieurs…
Cette analogie entre l’action des cellules PNEC et certaines symptômes de maladies respiratoires incite par conséquent le biologiste Yehuda Ben-Sharar, auteur principal de l'étude, et ses collègues à faire l’hypothèse que les récepteurs olfactifs des cellules PNEC pourraient être des cibles thérapeutiques intéressantes dans le traitement de certaines maladies respiratoires comme la BPCO, l'asthme ou encore l’emphysème (l’emphysème est une maladie pulmonaire caractérisée par la destruction de la paroi des alvéoles des poumons).
Cette hypothèse s’inscrit dans des travaux menés depuis plus décennie par les biologistes sur le rôle des cellules PNEC, suggérant que ces cellules sont probablement impliquées dans de nombreuses maladies respiratoires. On pourra par exemple se rapporter à l’article « Pulmonary neuroendocrine cells : Their secretory products and their potential roles in health and chronic lung disease in infancy » publié dès 1989, ou à l’article « Pulmonary neuroendocrine cell system in pediatric lung disease-recent advances », publié en 2007.
Signalons enfin qu'en avril 2013, le biologiste allemand Peter Schieberle avait annoncé lors de la 245e conférence de la Société américaine de chimie avoir trouvé des récepteurs olfactifs en divers endroits du corps humain comme le sang, le cœur et les poumons (lire sur le blog Passeurs de science l'article qui relate cette annonce "Le sang, le cœur et les poumons sentent-ils les odeurs ?"). A l'époque de cette annonce, l'article décrivant la découverte n'avait pas encore été publié.
Ces travaux seront publiés dans l'édition de mars 2014 de la revue American Journal of Respiratory Cell and Molecular Biology, dans un article intitulé « Volatile-Sensing Functions for Pulmonary Neuroendocrine Cells »