Citation:
Alors que la mort est si proche, que la tristesse et la souffrance dominent, il peut encore y avoir de la vie, de la joie, des mouvements d’âme d’une profondeur et d’une intensité parfois encore jamais vécues".
Marie de Hennezel -
A chaque jour suffit sa peine, et là il ne faut pas anticiper : il faut oublier de nous projeter, vivre seulement chaque jour comme il se présente. Ne pas imaginer le pire, garder toujours cette médiane et prodiguer tout l’amour dont nous sommes capables aux nôtres, vivre chaque moment avec eux le plus intensément possible. Ce n’est pas facile et cela demande en fait un gros travail sur soi et une adaptation permanente ainsi qu’une remise en question, marcher toujours selon le pas du malade, ne pas précéder la maladie. Ne pas vivre forcément un deuil prématuré ou anticipé. Vivre ce qui est donné de toutes nos forces, aimer les nôtres et le leur dire.
Dans la vie, il est des expériences qui se vivent mais qui restent intransmissibles. Tous les mots que l’on peut utiliser ne sont que bien pauvres, face à ce que l’on ressent, ce que l’on vit donc. Face à cette vie, si les mots sont pauvres, les forces peuvent également manquer. Et pourtant, tant qu’il y a vie, il y a espoir, et tout espoir induit sourire. Chacun a besoin de sourire, pour lui-même comme pour celles et ceux, les Autres, qui ont besoin de recevoir des messages par sourires interposés. La vie à laquelle on s’accroche, d’autant plus fort qu’on a peur qu’elle nous échappe, pour nous comme pour les autres, cette vie qu’on a pu donner et qu’on ne maîtrise en rien, EN RIEN ! Là aussi est la dureté de la vie, dans ces expériences subies. Pourtant, reconnaissons qu’elles recèlent des forces insoupçonnées, immenses, au moment où justement il s’agit, plus qu’à tout autre moment, de ne pas céder, comme si l’on était seul à supporter l’édifice. C’est en partie vrai, considérant que, placé au centre de son propre monde, on se doit de tenir ce que l’on a à tenir, et chaque parcelle de vie en fait partie. Mais (car toutes les situations il y a des « mais ») nous ne sommes que des humains, des HUMAINS. Le « que » précédent est superflu : nous sommes des humains, et ce n’est pas rien. La vie avance, sans que l’on sache toujours où elle nous entraîne. A chaque virage est une surprise, certaines dont on se passerait, d’autres qu’on ne regrette pas. Notre force d’HUMAIN réside dans cette capacité à sans cesse regarder devant tout en vivant avec son passé. Telle est la vie, celle des HUMAINS, notre vie. Ces mots ne sont rien, sinon … quelques mots, seulement des mots. Ils se veulent simples, des mots de vie.
En fait notre rôle est avant tout de donner au malade l’opportunité de laisser une image, une trace de soi. C’est un signe que nous accompagnants de l’ombre pouvons réussir à leur donner cette dignité, à les aider à accepter cette image d’eux-mêmes. L’image du corps a été dépassée pour atteindre une perception positive de soi. Le regard que l’on porte sur eux est à cet égard déterminant, il les aide à retrouver cette sensation d’intégrité et de bien être. Et c’est important. La mort reste une écharde douloureuse plantée au cœur de notre humanité, un redoutable point d’interrogation , surtout quand elle véhiculée par le cancer.
Dans le cas où les traitements visant à guérir le malade ne sont pas efficaces, il ne faut pas baisser les bras pour autant. Mais il est primordial d’assurer le confort du malade : physique mais aussi moral. Confort physique : c’est soulager la douleur et tous les symptômes qu’il peut présenter, et c’est le rôle du médecin traitant. Confort moral : c’est être présent, témoigner de son affection, de son amour. Répondre à ses questions, quelles qu’elles soient. Essayez aussi de lui parler d’autre chose que la maladie : de ce qui l’intéresse, l’amuse. Racontez lui des anecdotes personnelles... Bref, tout en partageant son chemin, donnez lui un peu d’espace de vie.
La maladie grave est confrontation : à soi, aux autres, à l’incertitude, à la décision, à la souffrance et parfois la proximité de la mort. Une confrontation qui renvoie parfois à la solitude et plus encore à notre condition humaine. Cette expérience expose, déroute, inquiète, questionne. Elle révèle et accentue les vulnérabilités : rien ne saurait nous y préparer. La personne malade en vient parfois à douter de tout, de ses valeurs et attachements, des choix possibles, de son devenir ainsi que de celui de ses proches, de sa vie relationnelle, de son existence même. Il en va de même pour les proches qui vivent dans l’angoisse et craignent une récidive avec métastases, une aggravation de l’état du malade et sa fin précipitée.
Et n’oubliez pas que personne, aucun médecin ne peut faire de prédiction chiffrée. Alors, ne vous focalisez pas sur les échéances, qui n’ont aucun sens. Mais accompagnez les vôtres dans cette épreuve : accompagner, cela veut dire marcher du même pas, sans chercher à trop se poser des questions comme "combien de temps ?" "pourquoi elle ?", "pourquoi lui ?" "pourquoi moi ?", "pourquoi nous ?", "pourquoi maintenant ?" etc -
les pourquoi et les comment n’ont souvent pas de réponse. N’en cherchez pas et vivez chaque jour avec intensité, prodiguez de l’amour, de l’affection, de la tendresse à vos malades. La chimio du coeur prévaut sur tout traitement.
Tout cancer comporte de l’inconnu, de l’incertitude. Ce que sera demain, personne ne le sait, face à la maladie qui nous fait passer, et parfois dans une même journée du pire au meilleur et du meilleur au pire. Le proche doit en être conscient ; mais surtout essayez de comprendre ce que ressentent vos malades, quelles sont leurs angoisses, leurs peurs, leurs questions. Et rappelez vous que votre présence leur est irremplaçable, une présence pas obligatoirement physique mais affective.
Bien sûr c’est toujours injuste ..trop injuste de voir souffrir les siens de la sorte et de se sentir si impuissants, coupables aussi de ne rien pouvoir faire .. Le cancer nous est aussi insupportable car il met brutalement fin à nos rêves inavoués d’immortalité .. et nous ramène subitement, sans ménagement à notre condition d’être humain que nous oublions souvent .. il nous renvoie à notre propre mort tout simplement et nous ne sommes que des êtres de passage ... et pour certains ce passage va être terriblement raccourci .. le cancer nous oblige à un peu plus d’honnêteté, de sincérité, d’humanité, à revoir notre copie aussi dans beaucoup de domaines .. de spir
Message édité par Malice @sia le 01-02-2012 à 10:24: