Qu’est ce que la « DCP », appelée aussi syndrome d’immobilité ciliaire primitive?
La dyskinésie ciliaire primitive (DCP) est une maladie génétique portant atteinte au système respiratoire.
Les termes: « Dyskinésie » signifie un défaut de mouvement« Ciliaire » signifie qu'elle touche les cils vibratiles de l'organisme.
« Primitive » signifie qu'elle est présente dès la naissance, sinon elle est secondaire et se nomme DCS.
La
DCP une maladie autosomique récessive, cependant quelques autres cas de
transmission génétique ont été signalés. La DCP n'est pas une maladie
contagieuse, mais des infections pulmonaires secondaires à la maladie
peuvent se développer. Celles-ci ne représentent pas de danger pour un
individu sain, mais une prudence est conseillée au contact d'autres
patients sensibles (autres DCP, MUCO, ...)
Sa prévalence est de
1/16.000, la fréquence des individus porteurs devrait être de 1/30 à
1/60 et 25 % des sujets ayant un situs inversus ont une dyskinésie
ciliaire. Le situs inversus est un terme signifiant une maladie
congénitale dans laquelle les principaux viscères et organes sont
inversés dans une position en miroir par rapport à leur situation
normale. On remarque une prévalence plus importante dans les populations
magrébines.
La DCP et Syndrome de « Kartagener »
Le syndrome de
« Kartagener » aussi appelé syndrome de « Siewert » est un ensemble de
symptômes qui regroupe le situs inversus, les bronchiectasies et les
polyposes nasales ; ces deux derniers étant en réalité des complications
de la DCP. Lorsqu'une DCP est accompagnée d'un situs inversus, on parle
alors du syndrome de Kartagener.
Sa prévalence est de 1/32.000 c’est à dire que dans un cas sur deux de DCP on retrouve un situs inversus.
Qu’est ce que le mécanisme d’épuration mucociliaire?
Descriptif complet des cils sur :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Video: Introduction to Mucociliary Transport Video Microscopy :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] (durée 6'18''- langue anglaise)
Comment se manifeste la DCP ?
À la naissance.
Elle se manifeste par un syndrome de détresse respiratoire néonatale « inexpliquée ».
Au niveau anatomique.
Le
situs inversus est un facteur qui oriente le diagnostic vers la
présence d'une DCP. Celui-ci peut-être partiel ou total. On retrouve
parfois un hippocratisme digital.
Au niveau des voies aériennes supérieures.
Les atteintes sont présentes dans plus de 95% des cas pédiatriques.
La
cavité nasale et les sinus sont tapissés de cils vibratiles qui
permettent l'élimination du mucus présent dans les voies aériennes
supérieures. Or dans la DCP, ces cils sont inefficaces, ce qui entraine
une stagnation des sécrétions, suivi d'une inflammation des tissus. Ceci
évolue alors vers une rhinite chronique et une sinusite chronique.
Au niveau de l'oreille moyenne.
Celle-ci
communique à la cavité nasale par un conduit appelé la trompe
d'Eustache. Une inflammation de la trompe d'Eustache causée par un
trouble de l'épuration mucociliaire est source d'otite chronique. Ceci
entraine alors une diminution de l'audition qui peut entrainer des
difficultés scolaires chez l'enfant.
Au niveau des voies aériennes inférieures (poumons).
Un
encombrement apparait dû à l'accumulation du mucus produit par le corps
et les particules inhalées. Ceci induira avec le temps des lésions
irréversibles au niveau des voies aériennes inférieures. Ces lésions
nommées bronchiectasies sont des dilatations localisées du diamètre
bronchique, elles sont déjà présentes chez 70 % des enfants de 10 ans.
Elle favorise l'apparition d'infections. De plus on note une diminution
des paramètres spirométriques avec un profil de type obstructif.
Au niveau de la vision.
Une
forme rare de DCP avec mutation du gène RPGR entraine une rétinite
pigmentaire. Cette maladie se manifeste par une perte de la vision
nocturne et un rétrécissement du champ visuel et peut éventuellement
rendre aveugle.
Au niveau neurologique.
Les cellules tapissant
l'intérieur des ventricules (appelées cellules épendymes) sont coiffées
de cils qui battent de façon synchronisée pour faire circuler le liquide
céphalorachidien (LCR) des sites de production vers les sites
d'absorption. Dans le cas de DCP, on peut alors retrouver de rares cas
d'hydrocéphalies communicantes.
Au niveau reproducteur.
Les
flagelles des spermatozoïdes sont également touchés par un défaut de
mobilité, ce qui entraine généralement une stérilité de l'homme.
Cependant ceux-ci conservent toujours leurs capacités à pouvoir féconder
l'ovocyte de la femme grâce à une procréation médicalement assistée.
En
ce qui concerne les femmes, les trompes de Fallope sont constituées
intérieurement par un épithélium cylindrique simple et cilié. Les cils
jouent un rôle essentiel dans la migration de l'ovule. Dans le cas de la
DCP, ce mécanisme est perturbé et peut-être la cause d'une
hypofertilité. Ce qui implique l'usage des techniques d'aide à la
procréation.
Comment évolue la DCP ?
Il existe de nombreuses
formes, certaines plus légères et d'autres beaucoup plus sévères mais au
plus tôt le patient sera diagnostiqué et aura une bonne prise en
charge, au plus le pronostic sera favorable.
Comment traiter un patient atteint de DCP ?
Une prise en charge précoce des infections respiratoires par une aérosolthérapie et une antibiothérapie est nécessaire.
Une
kinésithérapie des voies aériennes supérieures, celle-ci est basée sur
une hygiène des voies aériennes supérieures, complétée par des
techniques de gymnastique ORL et l'usage d'aérosolthérapie manosonique.
Une
kinésithérapie respiratoire des voies aériennes inférieures aide à
prévenir le développement de bronchectasies. Un drainage bronchique doit
être réalisé quotidiennement même en dehors des périodes d'exacerbation
afin d'éviter le développement de bronchectasies et l'apparition d'une
insuffisance respiratoire chronique.
Du point de vue chirurgical,
c'est l'ablation de lobes particulièrement endommagés qui sera
pratiquée, il y a peu de greffes contrairement aux patients atteints de
mucoviscidose. Une intervention chirurgicale est parfois nécessaire pour
corriger les anomalies cardiaques congénitales lors d'un syndrome de
kartagener avec situs inversus incomplet.
Meurt-on de la dyskinésie ?
La
maladie pouvant être très invalidante chez certains patients et ceci
même jeunes, n'est pas directement fatale en soi, mais les séquelles
(développement de bronchectasies avec insuffisance respiratoire
chronique) et pathologies secondaires découlant de la DCP diminue les
paramètres vitaux ce qui entraine une diminution de l'espérance de vie
par rapport à un individu sain. D'où l'intérêt d'une prise en charge
précoce et efficace afin de contrôler au maximum ces pathologies
secondaires. Une kinésithérapie de qualité est indispensable.
Quelques chiffres au sujet de la DCP:
Cette
maladie génétique orpheline rare concernerait 1 naissance sur 16.000.
Selon les dernières estimations du congrès réalisé à l’HUDERF en
décembre 2011, il y aurait 800 cas en Belgique dont seulement 220
dépistés !!
Selon la revue des maladies respiratoires
(RMR-01-2007-24-HS1-0761-8425- 101019-200520032), sur 54 adultes
atteints de DCP diagnostiquée par anomalie de l'ultrastructure ciliaire
et/ou association situs inversus + bronchiectasies. 63 % étaient de sexe
féminin. L'âge moyen était de 3 ± 4 ans aux premiers symptômes, 13 ± 13
ans au diagnostic et 31 ± 15 ans aux dernières nouvelles. 46 % avaient
un situs inversus. Les symptômes principaux étaient une bronchite
chronique (91 %), une sinusite chronique (86 %) et une dyspnée (73 %).
39 % avaient un rapport VEMS/CVF ≪ 70 %. 92 % avaient des
bronchiectasies. À la bactériologie bronchique étaient isolés H.
influenzae (66 %), S. pneumoniae (48 %), P. aeruginosa (37 %) et S.
aureus (29 %). Le traitement consistait en vaccination
antipneumococcique (82 %) et antigrippale (61 %), antibiothérapie
prophylactique (22 %), corticoïdes inhalés (58 %), bronchodilatateurs
(77 %), kinésithérapie (90 %), oxygénothérapie (11 %) et transplantation
pulmonaire (7 %). La survie globale était de 93 % à 60 ans. La survie
sans insuffisance respiratoire était de 100 % à 20 ans, 77 % à 40 ans et
55 % à 60 ans.
La recherche:
La recherche actuelle porte sur 250
protéines que composent le cil. Une anomalie dans l'une d'entre elles ou
une combinaison de plusieurs anomalies peut théoriquement être
responsable de la D.C.P. Des équipes de chercheurs ont la lourde tâche
d'apporter une solution pour éradiquer cette maladie très invalidante et
améliorer la vie quotidienne des patients, de leur famille et de leur
entourage.