[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Selon des considérations
traditionnelles, notre cœur, comme celui de tous les mammifères, est un
organes ne possédant que très peu de capacités régénératives, les
cellules le constituants devant être aussi âgées que l’individu à qui il
permet de vivre. Cependant cette hypothèse statique de la vie d’un
organe ne résiste pas à nombre de questions et plusieurs études nous ont
amené finalement à considérer les cellules cardiaques comme des
cellules capables de se régénérer. Cette nouvelle hypothèse fut
confortée par la découverte de cellules souches cardiaques ainsi que de
marqueurs permettant de les identifier. Et si de nouvelles cellules
cardiaques peuvent apparaître, que sont les phénomènes qui les
stimuler ? L’exercice physique semble être l’un d’entre eux mais la
démonstration manquait. C’est le travail qu’a mené l’équipe de Georgina
M. Ellison de l’université John Moores de Liverpool.En cardiologie, l‘évaluation d’un effort
est mené sur un tapis roulant, exercice au cours duquel il est aisé de
mesurer la VO2 max d’un individu, c’est à dire la quantité d’oxygène
consommée au maximum de l’effort : plus l’effort est intense et
prolongé, plus la VO2 max augmente. Les scientifiques de Liverpool ont
travaillé avec des rongeurs, leur faisant pratiquer ce type d’exercice
physique. Après 4 semaines d’entrainement, leur VO2 max, la masse de
leur cœur, et leur fonction cardiaque étaient mesurées et comparées à
celles de rats identiques mais restés sans entrainement. Différents
marqueurs signalant la croissance des cellules cardiaques nouvelles ou
de nouveaux vaisseaux sanguins nécessaires à leur irrigation, ont
également été mesurés.
Les résultats montrent qu’un
entrainement de faible intensité (mené à 60% de la VO2 max) et de forte
intensité (85-90% de la VO2 max) améliorent la capacité d’exercice
mesurée par l’amélioration de la VO2 max, ainsi que la masse du cœur. Un
exercice intense apporte la plus forte amélioration. Cette exercice
intensif entraine également une amélioration de la structure cardiaque
(remodelage positif) et accroit la fraction d‘éjection, la quantité de
sang que le cœur est capable d’éjecter en une minute, de 9%.
L’analyse cellulaire des cœurs des
animaux révèle certes que les cellules musculaires cardiaques ont
augmenté de taille sous l’effet de l’exercice mais montre également
l’apparition d’une nouvelle population de cellules cardiaques plus
petites, au niveau du ventricule, suggérant qu’
une nouvelle génération de myocytes a permis au cœur d’acquérir de nouvelles performances.
Le
nombre de ces nouvelles cellules cardiaques a cru constamment au cours
des 4 semaines d’entrainement et le nombre le plus important est
retrouvé chez les animaux ayant mené l’exercice physique le plus
intensif et le plus prolongé. Toutes les analyses menées par
les scientifiques convergent pour confirmer que ces nouvelles cellules
cardiaques sont apparues au commencement de l’entrainement. Par
ailleurs, ces analyses réfutent l’hypothèse que ces nouvelles cellules
apparaitraient en remplacement de myocytes plus anciens qui seraient
morts (apoptose) au cours de l’exercice.
En fait, 4 semaines d’entrainement ont permis d’accroitre de 4 à 7% le nombre de cellules cardiaques.
Et
cet accroissement de la population de cellules musculaires cardiaques
s’accompagne d’une formation de nouveau capillaires sanguins, les vaisseaux qui permettront de les nourrir, une formation qui elle aussi a débuté au commencement de l’entrainement intense.
Ces phénomènes apparaissent
grâce à la sécrétion, par les myocytes les plus anciens, de facteurs de
croissance (TGF-b1 en particulier), un phénomène stimulé par l’exercice
physique. Ces facteurs de croissance vont provoquer non
seulement une hypertrophie des cellules cardiaques les plus anciennes et
protéger leur survie mais aussi favoriser l’apparition de nouvelles
cellules cardiaques et de nouveaux capillaires. Et toutes ces
modifications, qui permettront au cœur de mieux fonctionner, sont liées
directement à la pratique d’un exercice intense et prolongé. Une étude
précédente avait montré toujours chez l’animal, que l’injection de ces
facteurs de croissance au moment d’un infarctus cardiaque accélérait la
« réparation » du cœur.
Pour les scientifiques de l’université
de Liverpool, «le fait qu’un entrainement intensif de quelques semaines
augmente le nombre de cellules musculaires cardiaques et la masse du
cœur indique un phénomène qui n’est pas une simple curiosité biologique
mais une composante majeure de la physiologie et de l’homéostasie
cardiaque. La réponse du cœur n’est pas liée au type d’exercice pratiqué
mais à son intensité.
Un tel phénomène, permettant
d’imaginer une potentielle “régénération cardiaque” serait évidemment
providentiel chez l’homme dans le cadre de la prise en charge
thérapeutique des pathologies cardiovasculaires. Un réentrainement
physique est toujours recommandé après un infarctus, mais l’intensité
appliquée peut varier en fonction des sujets et nombreux sont ceux qui
ne pratiquent alors plus du tout d’exercice. Cette découverte importante pose
donc de nouvelles questions passionnantes : quelle est la réponse du
cœur à un entrainement intensif prolongé comme le pratiquent certains
sportifs ? Quelle quantité de nouveaux myocytes l’exercice peut-il
générer au maximum ?qu’arrive t-il aux nouvelles cellules cardiaques
lorsque l’entrainement physique s’arrête. Les travaux destinés à
répondre à ces questions sont déjà en cours.