Thermoplastie bronchique : une option prometteuse pour traiter l'asthme sévère
Dans certains cas d'asthme sévère, les symptômes sont mal contrôlés par les traitements médicamenteux conventionnels. Pour ces patients, la thermoplastie bronchique permet de réduire la tendance qu'ont les voies aériennes à se rétrécir brutalement et de façon importante. Elle représente une option prometteuse pour ces patients. Cette nouvelle technique est actuellement testée en France.
De nombreux médicaments permettent de contrôler les symptômes de l'asthme. Mais dans certains cas, ces options ne suffisent pas à soulager un asthme sévère ou non contrôlé.
Zoom sur l'asthme non contrôlé
Jusqu'en 2009, le groupe GINA (Global Initiative for Asthma, un groupe d'experts à l'origine de recommandations internationales) classait cette maladie en 4 stades de gravité : intermittent (stade 1), persistant léger (stade 2), persistant modéré (stade 3) et persistant sévère (stade 4).
Thermoplastie bronchique asthmeMais en 2010, ces experts considèrent que l'évaluation de la sévérité des symptômes est peu objective car d'une part, ils sont fortement dépendants de la perception de chaque patient, et d'autre part, ils peuvent évoluer au cours du temps. En conséquence, le groupe GINA classe la maladie en fonction du degré du contrôle des symptômes en utilisant des médicaments adaptés à l'intensité et la fréquence de ces symptômes. Ainsi, l'asthme est désormais classé selon trois niveaux : asthme contrôlé, asthme partiellement contrôlé et asthme non contrôlé.
Cette méthode d'évaluation permettrait de mieux évaluer les risques d'aggravation soudaine des symptômes (exacerbation), d'instabilité, de dégradation rapide de la fonction pulmonaire et d'effets indésirables1. Cette classification permettrait au médecin de mieux évaluer le besoin d'une adaptation du traitement en fonction de la réponse du patient.
L'asthme non contrôlé est l'équivalent de l'asthme persistant sévère - terme qui, malgré tout, continue d'être employé par des spécialistes.
Le rôle du muscle lisse bronchique dans l'asthme
Un des éléments constituant la paroi des voies respiratoires est le muscle lisse bronchique (MLB), localisé à l'intérieur des voies aériennes. Chez les personnes asthmatiques, le MLB se développe de manière excessive. Ainsi épaissi, il diminue le calibre des voies aériennes, ce qui limite le passage de l'air et surtout, contribue à renforcer la contraction des bronches (bronchoconstriction) lorsque le patient asthmatique est exposé à un facteur déclenchant des symptômes (exposition aux allergènes, effort physique, contamination de l'air…). Ce phénomène expliquerait, au moins en partie, que certains patients ayant des symptômes sévères ne répondent que partiellement aux traitements médicamenteux. Dans certains de ces cas, l'asthme peut nécessiter une hospitalisation, voire devenir une menace vitale pour le patient.
Réduire la masse musculaire bronchique par thermoplastie
Utilisée avec succès depuis quelques années au Canada et aux Etats-Unis, la thermoplastie bronchique permet de réduire durablement la masse du MLB, ce qui diminue la capacité de contraction des voies respiratoires et ainsi la fréquence et la gravité des symptômes. Dans les pays où il a été approuvé (Etats-Unis en 2010, Canada en 2011, Royaume-Uni en 2013), cette technique est réservée aux patients atteints d'asthme sévère âgés d'au moins 18 ans et insuffisamment contrôlés par les corticoïdes inhalés et les bronchodilatateurs de longue durée d'action.
La thermoplastie bronchique en pratique
La réduction de la masse du MLB est obtenue en introduisant un cathéter thermique à l'aide d'un bronchoscope dans les bronches. Le cathéter est relié à un contrôleur de radiofréquence réglé pour permettre de délivrer une énergie thermique de 65°C le long des voies respiratoires. Ce procédé permet de réduire la masse du MLB sans endommager les tissus environnants ni provoquer des cicatrices ou rétractions. L'excès de MLB est ainsi littéralement détruit.
Le protocole consiste en trois séances successives, chacune espacée de trois semaines. Chaque intervention dure une heure environ et se fait sous sédation légère ou sous anesthésie locale en introduisant le cathéter de thermoplastie bronchique par le nez (le plus souvent) ou par la bouche. Sont ainsi traités successivement les voies respiratoires du lobe inférieur droit, celles du lobe inférieur gauche et, lors de la troisième séance, les voies aériennes des deux lobes supérieurs. A noter que le traitement de 3 séances par le système de thermoplastie ne doit être utilisé qu'une seule fois chez le même patient et qu'il ne peut pas être utilisé chez les personnes portant un dispositif électronique implantable5. Le système, produit par le laboratoire Boston Scientific, bénéficie du marquage de conformité européenne (CE).
Thermoplastie bronchique : des résultats encourageants à long terme
Plusieurs études montrent que le système de thermoplastie bronchique est une méthode efficace avec une amélioration du contrôle des symptômes de l'asthme jusqu'à 2 ans de suivi, et un bon profil de sécurité (selon une étude de sécurité d'emploi conduite sur 5 ans). Ces études rapportent une diminution de 30 % des crises d'asthme, une réduction de 84 % des consultations aux urgences pour des symptômes respiratoires ainsi qu'une diminution de 66 % des jours de travail ou d'école perdus à cause des symptômes d'asthme2,3,4
Attention après la thermoplastie, les patients peuvent présenter une augmentation des symptômes d'asthme, des sifflements, une toux, un essoufflement, des douleurs thoraciques et parfois une infection respiratoire. Ces effets sont observés en général le lendemain de l'intervention et disparaissent au bout de 7 jours en moyenne avec un traitement adapté.
La thermoplastie bronchique à l'essai en France
Depuis janvier 2013, la thermoplastie bronchique est à l'essai en France. Cette première dans notre pays se déroule dans le service de pneumologie du Pr Michel Aubier à l'hôpital Bichat à Paris. Le personnel médical ayant été formé préalablement à la procédure par du personnel du laboratoire Boston Scientific, la première patiente avait été traitée en début d'année. Au total, une vingtaine de patients devraient en bénéficier. Vingt autres patients doivent être traités à partir du mois de septembre 2013 par les équipes du Pr Pascal Chanez à l'hôpital Nord de Marseille, soit un total de 40 patients asthmatiques sévères traités en France. Selon le Pr Michel Aubier, au 21 août 2013, 18 patients avaient été traités dans son service de l'hôpital Bichat, tous atteints d'un asthme très sévère, non contrôlés par les traitements conventionnels et ayant un muscle lisse bronchique très épais. Sans qu'il s'agisse de résultats scientifiquement validés, le ressenti de cet expert est très positif : "les résultats jusqu'ici sont encourageants car le traitement semble très efficace pour ce type de patients".
Le prix du traitement n'est pour l'instant pas remboursé : 4 000 euros la séance soit un total de 12 000 euros pour les trois séances. Une somme justifiée par le coût élevé de l'appareil de radiofréquence et des cathéters à usage unique. Cependant, pour le Pr Aubier, il serait intéressant de comparer les dépenses annuelles directes (liées aux soins) et indirectes (liées à l'absentéisme professionnel par exemple) générées par ces patients particuliers traités par thermoplastie et ceux traités par d'autres méthodes6.
Jesus Cardenas
Créé le 28 août 2013