Si certains usagers du tabac arrêtent de fumer sans aide(1), ou en recourant à des dispositifs de substitution non soumis à prescription médicale, un grand nombre manifeste le besoin d’un soutien thérapeutique.
Comme le rappelle la HAS, la caractéristique essentielle de la dépendance, ou addiction, est la perte de la liberté de s’abstenir. Elle se caractérise par un désir compulsif de consommer associé à la perte de contrôle de la consommation. (Critères de dépendance de la CIM-10).
Mais quelles thérapies fonctionnent réellement ? Et comment maximiser leur effet ?
La HAS a présenté le 21 janvier ses "recommandations de bonnes pratiques" (RBP) pour l’accompagnement de l’arrêt du tabac, synthèse rigoureuse des consensus cliniques et des données scientifiques actuellement disponibles sur ce sujet.
Première recommandation des experts : l’aide à l’arrêt doit faire l’objet de consultations "spécifiquement consacrées à cette prise en charge". Il s’agit de donner à la démarche du patient toute son importance, et d’y consacrer du temps.
Les études scientifiques démontrent que l’accompagnement psychologique est la base de la prise en charge du patient. Mais, rappelle la Haute Autorité de Santé, si le patient présente une dépendance (voir encadré), il est recommandé de proposer un traitement médicamenteux.
Parmi eux, les traitements nicotiniques de substitution (TNS) tels que patchs, gommes à mâcher, pastilles ou sprays "[constituent] le traitement médicamenteux de première intention" pour soulager les symptômes de sevrage, réduire l’envie de fumer et prévenir les rechutes. Ces traitements médicamenteux sont vraisemblablement plus efficaces lorsqu’ils sont associés à un suivi par un professionnel.
Quatre autres "thérapies et méthodes" sont recommandées "en première intention" pour augmenter la probabilité d’arrêt du tabac : le soutien psychologique, en face à face ou en groupe (y compris dans le cadre de thérapies cognitives et comportementales), les entretiens motivationnels, l’accompagnement téléphonique et, enfin, toutes les techniques dites "d’auto-support" (manuels ou programmes structurés d’accompagnement à l’arrêt du tabac, dans un format écrit ou vidéo)
Quid de la
électronique ?
En raison de "l'insuffisance de données sur la preuve de leur efficacité et de leur innocuité", la HAS considère qu’il n’est actuellement pas possible de recommander formellement les cigarettes électroniques pour l’aide au sevrage tabagique ou la réduction du tabagisme. Toutefois, dans la mesure où les cigarettes électroniques sont selon toute vraisemblance "moins dangereuses que le tabac", son utilisation "ne doit pas être déconseillée" chez un fumeur.
L’utilisation de ce dispositif "doit s'inscrire dans une stratégie d'arrêt ou de réduction du tabac avec accompagnement psychologique".
Des traitements "de dernière intention"
La HAS consacre un pan important de ses recommandations au cas particulier de deux médicaments, la varénicline et le bupropion
. Elle note que les études destinées à évaluer les risques de ces médicaments "sont contradictoires", mais souligne que "des effets indésirables graves ont été observés, en particulier en relation avec le suicide et l’état dépressif". Pour la HAS, "ces médicaments nécessitent [donc] une réévaluation du rapport bénéfice/risque dans le contexte des alternatives thérapeutiques, notamment les TNS, vis-à-vis desquels ils n’ont pas montré de supériorité."
"Pour ces raisons", note la Haute Autorité, "la varénicline et le bupropion sont recommandés en dernière intention."
La HAS dresse également une liste de traitements pharmacologiques "dont l’efficacité et l'innocuité ne sont pas établies" : rimonabant, clonidine, cytisine, lobéline, antagonistes et agonistes partiels des opiacés, mécamylamine, buspirone, diazépam, doxépine, méprobamate, ondansétron, métoprolol, oxprénolol, propanolol, nicobrevin… sont autant de spécialités pharmaceutiques "[qui] ne sont pas indiqués dans le sevrage tabagique".
Ne pas décourager le patient
Concernant l’acupuncture ou hypnothérapie, la HAS rappelle que ces approches ont échoué à démontrer leur efficacité. Elle note toutefois qu’elles n’ont pas montré, à ce jour, "de risque majeur". "L’éthique du médecin ne lui permet pas de recommander une thérapeutique non validée. Pour autant, le médecin ne doit pas empêcher un patient de bénéficier d’un traitement qui peut être utile de par son effet placebo, si ce traitement est avéré inoffensif", estime la HAS.
De fait, la HAS note que la méthode aversive (qui consiste à fumer à un rythme soutenu jusqu'au surdosage dans l’objectif de ressentir des effets aversifs) n’a pas montré d’efficacité dans l’aide à l’arrêt du tabac, et présente quant à elle des effets indésirables.
1) Seuls 3 à 5 % des fumeurs qui ont essayé d'arrêter de fumer sans aucune aide réussissent à passer le cap des 12 mois.