LA REHABILITATION
Un défi ; Une leçon de courage
Insuffisant respiratoire, il a fait Paris-Brest… à vélo !
Relier Paris et Brest en vélo et sous oxygène, c’est possible ?
C’est en tout cas le défi que s’est lancé Jean-Marie EDERER, atteint de broncho-pneumopathie chronique obstructive. Et qu’il a relevé haut la main.
Jean EDERER a 68 ans. Et une quarantaine d’années de cigarettes derrière lui. Il y a dix ans, on lui a diagnostiqué une broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO), une maladie évolutive qui, à deux reprises, a failli lui coûter la vie. Et qui l’oblige à vivre avec une cuve d’oxygène chez lui et des tubes dans les narines. “ La première année après ma deuxième décompression, je suis resté à la maison. La BPCO touche tout : le physique, le moral, le cerveau. Mais grâce à mon entourage et au corps médical, je m’en suis sorti ”, raconte-il.
Q : Comment vivez-vous la maladie au quotidien?
Et en mai 2008, Je me suis lancé un défi:
Pédaler de Paris à Brest… sous oxygène.
J.E : Aujourd’hui, je vis sous oxygène, normalement… ou presque. A domicile, je respire par les narines, reliées à une cuve d’oxygène par des lunettes et un tube pour circuler dans toutes les pièces. Je ne sors jamais sans mon appareil portable sur le dos : 5 kilos d’oxygène à portée de nez. Je prends des médicaments, et suis un traitement sportif, ça fait partie de la thérapie. Cela s’appelle la réhabilitation.
Tous les matins, je fais 35 minutes de vélo à la maison, la meilleure façon d’améliorer la respiration. Et deux à trois après-midi par semaine, j’embarque mon “ portable ”, sors de chez moi, et pédale 40 à 50 kilomètres. Je suis président de mon association, l’ALDDIR*.
Q : Pourquoi vous êtes-vous lancé ce défiJ. E. : Ma compagne pédalait avec moi, et une femme, insuffisante respiratoire également, conduisait la voiture-balai derrière, pour assurer notre sécurité et garder les réserves d’oxygène. Après 14 jours, on est arrivé au bout. Fatigué… mais heureux. Dans toutes les villes, on a reçu un accueil très chaleureux. Grâce à la FFAAIR**, j’ai pu réaliser mon projet.
Et me faire connaître. On a été médiatisé. J’ai rencontré, à chaque étape, des élus locaux pour leur parler de la BPCO. J'ai pris contact avec des malades, avec le monde médical. Je me souviens d’un médecin qui traite des insuffisants respiratoires, qui n’en revenait pas de me voir fonctionner comme un homme “ normal ”.
Je ne dis pas que tous les insuffisants respiratoires doivent réaliser des exploits en vélo, mais je voulais leur montrer qu’on peut vivre comme tout le monde avec
une bouteille sur le dos.
* Association Le défi des insuffisants respiratoires
** Fédération française des associations et familles de malades, insuffisants ou handicapés respiratoires :
Q. Pourquoi vous êtes-vous lancé ce défiJ. E. : Pour moult raisons…
- Pour ma santé d’abord : l’exercice physique fait partie du traitement, comme un médica-ment. Depuis mon Paris-Brest en vélo, je suis passé des appareils portables de 5 à 2,5 kilos.
- Pour sortir, ensuite : le vélo d’appartement, c’est sympa, mais je commence à trouver ça un peu rasoir… Mais aussi pour sensibiliser les gens à cette maladie, qu’on connaît mal mais qui est en passe de devenir une des plus mortelles de ce siècle, et pour mettre en évidence les besoins quotidiens des insuffisants respiratoires.
Vivre sous oxygène veut dire, pour beaucoup de monde, rester coincé à la maison. Au début, on assume mal le regard des autres, sur notre bouteille dans le dos, et nos lunettes dans le nez.
Et puis, difficile de partir loin et longtemps quand on n’a que dix heures d’autonomie. Quant à partir en vacances, ça nécessite une organisation astreignante.
Il faut prévenir les prestataires, qu’ils viennent installer l’oxygène… et ne plus changer d’adresse. Seuls ces prestataires à domicile en fournissent, on ne peut en acheter nulle part, ni en pharmacie, ni à l’hôpital. Toute notre vie tourne autour d’une cuve !
- Et enfin, pour prouver aux autres, et à moi-même, qu’on peut vivre comme tout le monde. J’ai toujours fait des randonnées cyclo : le Canal du midi ou Paris-Strasbourg en vélo. Et même malade, je suis capable de faire un Paris-Brest.
Merci Jean de ce témoignage. Merci de cette leçon de courage et de volonté.
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