Les traitements antirejet à la base de toute greffe
Parallèlement aux progrès incontestables de la chirurgie, l'amélioration du pronostic des greffes est aussi largement due à la découverte et au développement de médicaments qui permettent de prévenir le rejet.
Une des principales limitations des greffes est le rejet aigu du greffon. Ce rejet est dû au fait que l’organisme et son système immunitaire ne reconnaissent pas le tissu ou l’organe greffé comme leur appartenant. Ils le considèrent comme étranger et vont le traiter comme un "ennemi". Le corps va donc réagir contre cet intrus comme il le ferait face à une bactérie, un virus ou un champignon.
Un certain nombre de réactions immunitaires vont se mettre en place et aboutir à la mort (nécrose) du greffon.
Limiter la réaction immunitaire
Après une greffe, la prévention du rejet passe donc toujours par une inhibition ou au moins une réduction des réactions immunitaires. Pour ce faire, les médecins disposent aujourd’hui de plusieurs molécules. Ces médicaments vont agir à différents niveaux des réactions immunitaires pour en limiter l’expansion et l’ardeur. Ce sont les immunosuppresseurs.
Les premiers médicaments utilisés pour réduire les réactions immunitaires furent les corticoïdes et l’azathioprine, souvent utilisés en association. Bien connus de tous, les corticoïdes sont des anti-inflammatoires très puissants mais aussi des immunosuppresseurs. Malheureusement, leur emploi au long cours entraîne des effets secondaires qui en limitent l’usage même si leur association à l’azathioprine a permis la réduction de leur posologie tout en maintenant leur efficacité.
Années 80, La ciclosporine : une substance miracle
La ciclosporine A (SANDIMMUN ©) commence à être utilisée pour la prévention du rejet de greffe rénale et s'impose comme l'immunosuppresseur de référence, en association avec les corticoïdes et ou l'azathioprine (IMUREL ©). En effet, cette substance extraite d'un champignon microscopique permet aussi de réduire encore la posologie de corticoïdes. Elle est également plus efficace permettant des survies du greffon et du patient jamais atteintes. Bien sûr, la ciclosporine A est un médicament présentant des effets secondaires, notamment pour le rein.
Cette toxicité est aujourd'hui mieux contrôlée grâce à une diminution des doses et un meilleur suivi par un dosage sanguin 2 heures après la prise du médicament (C2). Cette molécule peut avoir tendance à augmenter la pression artérielle et à favoriser la pousse des poils (hirsutisme).
Années 90, L'immunosuppression s'enrichit.
Dans le courant des années 90, le tacrolimus (PROGRAF ©) est commercialisé et devient une alternative à la ciclosporine A dont la présentation se modifie avec une forme mieux absorbée : NEORAL ©. Puis l'acide mycophénolique (CELLCEPT © puis une forme gastro-protégée : MYFORTIC ©) est également mis à disposition des médecins et se destine à rendre l'immunosuppression plus efficace. L'association de plusieurs de ces médicaments a permis d'adapter le traitement anti-rejet en fonction de chaque profil de patients et d'allonger la survie du greffon.
Fin des années 90, de nouveaux anticorps monoclonaux le basiliximab (SIMULECT) et le daclizumab (ZENAPAX) sont commercialisés et viennent compléter la gamme des immunosuppresseurs en permettant une immunosuppression plus intense dans les premiers jours suivant la greffe.
Années 2000, De nouvelles voies de traitement .
Des inhibiteurs du signal de prolifération apparaissent avec le sirolimus (RAPAMUNE ©) et leur place se précise peu à peu. Aujourd'hui, l'éverolimus (CERTICAN ©) sur le point d'être commercialisé parait apporter un bénéfice majeur en transplantation cardiaque*.
. et la recherche continue !
Actuellement, plusieurs laboratoires pharmaceutiques s'emploient à rechercher de nouvelles molécules. Ces molécules en développement sont encore plus spécifiques, neutralisant de nouvelles cibles impliquées dans le mécanisme de défense immunitaire. Leur mode d'action les rend toujours efficace mais moins toxiques.
Au final, la complexité du système immunitaire humain nécessite que les laboratoires continuent à rechercher de nouvelles voies thérapeutiques permettant d'obtenir une excellente balance entre efficacité et tolérance pour une meilleure survie et qualité de vie des patients.
François Resplandy