830.000 Français sous ventilation à cause des apnées du sommeil
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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]damien Mascret - le 01/09/2015
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Le nombre de malades appareillés devrait atteindre 1 million en 2016 et les coûts dépasser le milliard d'euros.
L'apnée du sommeil est de mieux en mieux dépistée et traitée. En 2014, ce sont 828.047 malades qui ont mis chaque nuit un masque respiratoire les reliant à une machine de ventilation en pression positive, soit 15 % de plus que l'année précédente d'après un rapport de l'Assurance-maladie. Ils étaient 550.000 en 2012 et deux fois moins en 2006.
«L'apnée du sommeil, autrement dit les pauses respiratoires prolongées (de plus de 10 secondes) pendant que l'on dort, concerne 5 % de la population, mais tous ne sont pas diagnostiqués», précise le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue à La Rochelle et président de l'Association BPCO (broncho-pneumopathie chronique obstructive). Avec des conséquences majeures pour la santé et la qualité de vie. Y compris celle des proches. Les chutes de l'oxygénation s'accompagnent de reprises inspiratoires très bruyantes, et ce sont bien souvent ces ronflements puissants qui réveillent les conjoints et motivent les consultations.
Mais l'impact du syndrome d'apnée du sommeil est surtout pour le malade. D'abord la fatigue et la somnolence diurne. Elles sont la conséquence directe d'un «mauvais sommeil» dû aux micro-éveils qui accompagnent l'asphyxie. Ensuite les troubles de la concentration et de la vigilance, qui peuvent entraîner des accidents, que ce soit au travail ou sur la route.
Changement spectaculaire
«La plupart des malades se recrutent parmi les ronfleurs, mais tous les ronfleurs n'ont pas d'apnée du sommeil», précise le Dr Yves Grillet, vice-président de la Fédération française de pneumologie.
Une fois le diagnostic confirmé par des examens spécifiques et le diagnostic de BPCO écarté, les malades qui l'acceptent (environ 85 %) peuvent être placés sous ventilation en pression positive (PPC). Dans les autres cas, à condition que l'apnée ne soit pas trop sévère et que l'état mandibulaire et dentaire le permette, une orthèse d'avancée mandibulaire (OAM) peut être proposée. Elle dégage le pharynx en avançant la mâchoire inférieure. Dans ses propositions pour 2016, l'Assurance-maladie espère aboutir à «un transfert progressif de 20 % des traitements par PPC vers un traitement par OAM (orthèse d'avancée mandibulaire)» en en remboursant la pose, s'il s'agit du premier traitement proposé, ce qui n'est pas le cas actuellement.
Reste que c'est d'abord la PPC qui a fait la preuve de son efficacité. «Le changement est spectaculaire, témoigne le Dr Grillet. En quelques jours, parfois dès la première nuit, les patients dorment bien, ils se réveillent frais et dispos.» De surcroît, les études ont prouvé que la PPC réduisait le risque d'accident cardio-vasculaire, nettement augmenté dans l'apnée du sommeil. Les cardiologues se sont même aperçus que certains hypertendus chez qui le traitement antihypertenseur ne marchait pas bien souffraient en réalité de ce syndrome.
Des capteurs qui font polémique
Même si la PPC est efficace, le sujet de la télésurveillance automatique des données enregistrées par les machines de ventilation, pour améliorer la qualité des soins, est très polémique. Les ministères de la Santé et du Budget ont mis le feu aux poudres, en publiant le 22 octobre 2013 un arrêté conjoint pour conditionner le remboursement de la PPC à la preuve que la machine est bien utilisée par le patient, grâce à des capteurs qui transmettent automatiquement les données. Le texte définit ainsi des seuils d'efficacité, avec un nombre minimal d'heures d'utilisation. Le président de la Fédération française des associations et amicales de malades insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR), Alain Murez, porte l'affaire devant le Conseil d'État et met en garde contre un glissement pernicieux: «Après les malades apnéiques viendra le tour des diabétiques qui ne se seront pas soumis à un programme de nutrition jugé suffisant pour faire baisser leur glycémie, ou encore les hypertendus, voire les asthmatiques, qui n'auront pas pris régulièrement leur traitement.»
En novembre 2014, le Conseil d'État a annulé cet arrêté. En réalité, le Conseil d'État ne s'est pas prononcé sur le «bien-fondé de ce mécanisme» mais sur la voie choisie, estimant qu'il aurait fallu passer devant le Parlement. Et l'idée d'une régulation plus rigoureuse n'est pas absurde car la France semble bien généreuse par rapport à ses voisins européens, à services équivalents.
En 2012, déjà, alors que les bénéficiaires de PPC n'étaient encore que 550.000, l'Assurance-maladie s'étonnait de l'écart de tarif annuel de traitement par la PPC entre la France (1105 €) et l'Allemagne (de 250 à 610 €), selon la caisse et le type d'appareil. «La France a décidé de privilégier la qualité, et le patient est libre de choisir son prestataire et d'en changer s'il le souhaite, alors que le choix est limité par appel d'offres en Allemagne», explique le Dr Le Guillou. Ce qui explique peut-être l'écart de prix entre les deux pays.
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