BPCO et corticothérapie : "Il y a une surprescription majeure !"
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A l'occasion de la Journée mondiale de la BPCO, le professeur de pneumologie Bruno Housset a fait le point sur cette maladie du souffle méconnue et largement sous-estimée.
La bronchopneumopathie chronique obstructive est une affection des bronches qui diminue le flux respiratoire. L'obstruction est causée par une inflammation accompagnée d'augmentation des sécrétions bronchiques.
Infog lesouffle.org
C'est une vie au ralenti que vivent les 3,5 millions de personnes touchées en France par la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Marcher, monter les escaliers, porter ses courses... Chaque effort tend à couper le souffle. Et pour cause, la BPCO est une affection des bronches qui diminue le flux respiratoire. Elle est due à un processus d'inflammation des voies aériennes irréversible qui provoque un épaississement des parois et conduit à la destruction progressive des petites alvéoles du poumon. Principal facteur de risque ? le tabac : il est en cause dans 80% des cas.
"Le poumon est le premier organe à être en contact avec les composants de la fumée du tabac", rappelait le professeur en pneumologie Bruno Housset lors d'une conférence de presse organisée à l'occasion de la journée mondiale contre la BPCO du 16 novembre 2016. Or les composants du tabac entraînent une production excessive de mucus qui favorise les infections bronchiques.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] Un capital respiratoire à préserver
La survenue d'une BPCO dépend de plusieurs facteurs, mais il apparaît de plus en plus que chaque individu part dans la vie avec une sorte de "capital respiratoire" dépensé plus ou moins rapidement selon l'historique clinique de chacun.
"On se rend compte actuellement que tout ce qui se passe dans l'enfance (l'asthme, les infections sévères, le tabagisme des parents, sans parler de la pollution) a un impact sur la fonction respiratoire. Le chemin dans lequel va évoluer la fonction respiratoire se trace pendant l'enfance, précise le Pr Housset.
Ainsi, ceux qui partent avec un capital respiratoire diminué sont ceux qui vont être plus rapidement atteint par la BPCO." A tel point que certains vont même jusqu'à parler de la BPCO comme d'une maladie pédiatrique.
"Il ne faut pas exagérer car on ne diagnostique pas de BPCO chez l'enfant, mais il est vrai qu'une part de la maladie se joue à ce moment là, très tôt donc", tempère le Pr Housset.
Alors même que la maladie tue 3 à 4 fois plus que les accidents de la route, elle souffre d'un
"vrai problème de communication et reste malheureusement trop méconnue du grand public", regrette le pneumologue. Un constat d'autant plus regrettable que la progression de la maladie est insidieuse avec des symptômes tardifs non spécifiques. Or une meilleure information permettrait d'alerter chacun sur une éventuelle baisse des capacités respiratoires.
"On a tendance à banaliser les symptômes, rappelle le Pr Housset
, lorsqu'à 65 ans on s'essouffle un peu rapidement, on se dit que c'est normal, or ça ne l'est pas forcément." Or la gêne respiratoire apparaît alors que l'obstruction est déjà importante.
Limiter la corticothérapie inhalée et rompre le cercle vicieux
Le diagnostic de la BPCO n'est pourtant pas difficile à poser. Encore qu'il est important de bien déterminer le degré d'atteinte, car c'est en fonction que le traitement le plus adapté pourra être choisi. La spirométrie (mesure du souffle) est l'examen de référence qui permet de mesurer les volumes pulmonaires et les débits bronchiques du patient. En ce qui concerne les traitements, la Société de pneumologie de langue française a actualisé ses recommandations de prise en charge au début de l'année 2016. Celles-ci tendent notamment à réduire l'utilisation de la corticothérapie inhalée au profit des bronchodilatateurs qui augmentent le calibre des bronches en relâchant les muscles bronchiques.
"La corticothérapie doit être réservée à des cas sévères et conditionnée à une efficacité réelle, avertit Bruno Housset.
Or aujourd'hui il y a une surprescription majeure ! On estime que 70% des patients reçoivent une corticothérapie inhalée. Pourtant, si l'on refait les calculs, ces prescriptions ne devraient pas excéder 15 à 20%." Ce traitement encore trop prescrit n'est pourtant pas anodin. Non seulement son efficacité semble limitée mais il présente certaines complications associées avec un risque de pneumonie qui s’ajoute aux effets secondaires déjà connus, sur l’œil et la cataracte.
"Si la corticothérapie ne présente pas de vrais résultats, il est préférable de revenir à une double bronchodilatation", conclut ainsi le Pr Housset.
L'autre axe majeur de la prise en charge consiste à rompre le cercle vicieux de la maladie dit de "déconditionnement musculaire". En effet, avec le souffle qui se fait plus court, les patients ont naturellement tendance à faire moins d'effort et à réduire leurs déplacements. Une sédentarité s'installe peu à peu qui contribue à l'atrophie des fibres musculaires nécessaires au maintien de la fonction respiratoire. Il est donc important de maintenir une activité physique en plus des traitements prescrits. Et inutile de rappeler en ce mois sans tabac, que la
doit être bannie.